Îles

Correspondances et cartes

À la fin...

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Penthésilée, à la fin... enter image description here

C'est vrai, j'adore les autres « mondes ». Au risque qu'on me croit « exote » Suis-je en visite ? Peut-être. Je ne sais pas. J'ai l'impression grandiloquente de reproduire ce qu'a fait en son temps Jack London, côtoyer.

Au début, les regards sur moi étaient durs, réprobateurs. Indifférents, ensuite. Je ne mouftais pas, serré dans un coin. La tête baissé, l'air vague, en moi-même, faisant le vide dans ma pensée, délaissant les mots, ne dénommant plus les sensations, ignorant les stimuli anamnestiques. Aux confins de la langue, attouché au réel.

j'appelais çà, aller à Tarsis. Le vertige du vide, ce gouffre affolant qui me sépare de l'autre. Qu'importe si je ne suis d'aucun monde ? Errant aux marges, j'ai l'impression d'éprouver les liens que tissent les autres entre eux, en forte tension et vulnérable, délié.

L'ivresse de l'attache, et la peur qu'elle se rompe pour un bannissement ? Pour quelle reconnaissance ? Comme si ce qui importait, ce n'était pas tant son appartenance à ce monde que la place qu'on y occupe comme une forme d'authenticité, de réelle permanence d'y être toujours reconnu, d'en être.

Quoi qu'il arrive et, même si, pour une raison malheureuse, il advenait qu'on s'en écarte, on resterait quand même relié à ce monde.

je suis là parce que, peut-être, ce monde n'est pas hors de la cité. Suburbain, îlot de sociabilité obscure, discret au cœur des centres où tous convergent pendant les nuits, ce monde là est celui d'une préférence au delà même des désirs.
Passages.

Ce n'est pas tant que cet état serait de nature. Non, ce qui est le plus terrible, c'est que sa culture est si ésotérique. Elle se fonde sur l'ascèse effrayante de l'oblation qui est découverte du manque de l'autre et qui met tant de temps à apparaître comme une évidence.

Longtemps, on doit être dans le voisinage de l'autre sans le savoir vraiment. Même si, quand on a l'impression de comprendre, enfin, on pense qu'on l'avait su depuis toujours sans se l'avouer vraiment.

Au début, pourtant, il y avait l'innocence et l'inquiétude.
Et à la fin comment sera-ce ?
Amertume et solitude ?
Désillusion et solitude ?
Apaisement et solitude ?
Amour perdu et solitude ?
L'appartenance à ces mondes décalés, codés, comme de toujours, semble intangible et, pourtant, tout paraît si fragile. Ce qui est de plus mille ans pourrait disparaître en une nuit écarlate.
Si bien que ceux qui raconteraient ce qui fut, on croira que c'est une histoire mythologique.
Penthésilée, à la fin...
Je ne suis pas ce que vous croyez.

Oubliez-moi.

- Posté en Du côté de par

Je ne peux m'empêcher de rire. Faire retraite
pour mieux travailler, io crepo se non rido!

Bon, j'arrête avant le hoquet fatal. Il y a longtemps,
très. Avant le grand exode qui a duré, mais duré tant
qu'il n'est pas encore tout à fait terminé.
Du temps d'avant l'exode rural et de la frénésie sub-
urbaine qui nous a pris si violemment, on était d'un
village.

Et quand je dis qu'on était d'un village, je veux dire
qu'on était d'une famille qui habitait tel village.
Ce qui ne veut pas dire qu'on était vraiment de ce village là.
Être d'un village, c'était appartenir à une famille qui
était là depuis toujours, qu'on ne se souvenait pas d'un
temps où cette famille n'habitait pas là.

Il suffisait qu'un seul villageois se rappelle d'une époque
où personne de votre famille n'y habitait pour qu'on dise,
vous n'êtes pas d'ici.
Quelquefois, celui-là avait encore en mémoire l'endroit,
un autre village distant d'au moins 2 lieues, d'où votre
aïeul venait.
Ça pouvait s'être fait 4, 10 ou 20 siècles avant. Qu'importe.
Tant qu'un seul ancien se le rappellera, vous ne serez point
d'ici.

Vous imaginez un peu le voisinage, il en sait plus sur
vous que vous-même. La couleur de vos cheveux,
et celle de vos yeux, il vous cite quelqu'un de votre
famille qui avait justement ces caractéristiques physiques.
Même le caractère, et la morale, le tempérament et
l'intelligence vôtres, sont connus avant que vous ne soyez né.

On peut comprendre que certains à la réputation moyenne
ou qui voulait ne se faire que par eux-mêmes, se soit enfui
de là pour que cesse la litanie des souvenirs familiaux si
implacables que vous n'étiez jamais que de cet famille qui
était d'ici ou d'à côté.

Le cloître, c'était peut-être un bon moyen pour qu'on vous
oublie. Silence, ne me dites plus rien de moi !

Mais, il y a pas beaucoup de moyens de ne pas se souvenir
soi-même de soi. On devient son propre contempteur.
Rien de si harassant que le travail pour s'oublier soi-même.

Voyageur, étonnant !

- Posté en Du côté de par

Dans le ventre chaud du Léviathan, on aime se vautrer sous la surveillance des mères évertuées à attendre les départs.

Car on part de nos jours et plus qu'on ne le croit. Simplement, on se rend en masse dans des mers du Sud étonnantes certes, mais laides et sévères comme les anciennes tenancières des commerces qui comptaient aussi bien et même mieux que les comptables oblats et clercs des institutions vénérables et froides aux mains des pères absentés.
En se rendant au delà des milieux surchargés, on gagne plus, il parait.
Et si on s'en va dans des places off-shore d'entre les frontières, c'est aussi pour rêver d'un ailleurs, d'une vie d'outre-enfance qui s'exubèrerait des confins.

De prodigue, on reviendrait exote soi-même, paré des rêves qu'on a perdu en chemin. Enfin son Je transcendé en un autre qui serait inconnu à soi-même et nous serions fier d'avoir mué, de le faire savoir rien qu'en apparaissant à nouveau, heureux d'avoir fait un voyage.
Et de pouvoir mentir. Oui. Mentir son soûl.

Car on raconterait n'importe quoi, des êtres et des paysages inventés mais que nous avions poursuivis vainement.
L'espoir de l'Autre, nous l'avons définitivement abandonné.

Alors que nous étions venus là pour se garder une place là-bas dont nous venions, d'autres étaient déjà dans cet ailleurs surévalué pour se construire une place qu'ils n'avaient jamais eu là d'où ils s'étaient enfuis et ils étaient habités par avance de la peur qu'on la leur volât quand ils seraient retournés.
En fait, nous avions en tête les mêmes calculs.
Et de nos paris respectifs lesquels étaient les plus sûrs ?
Nous ne le savions plus.
En tous cas, c'était certains nous étions absolument semblables, au mot près.

Ailleurs, le temps est suspendu car il n'y a pas d'occasion de s'installer. Tout y est si prévisible et transitoire. Transit est le maître-mot des conditions hagardes de ceux qui œuvrent pour des économies. Les grandes qu'ils servent, les petites qu'ils accumulent pour leur retour.

À quoi bon révéler des vérités prosaïques :
Nous étions si seul le matin dans la chambre vide de toute humanité. Un oiseau accroché sur le rebord étroit de la fenêtre étanche perçait l'insonorité industrielle de ses cris affreux d'animal, adressés à l'animal que nous étions nous-même, s'éveillant à peine. Aussi, seul nous étions, avec, en plus, la conscience de notre faim de quelque chose pour laquelle nous n'avions pas de mots.

Et ce n'était pas seulement de nutriments pour la chair dont nous manquions, mais d'idéal. Car c'est ainsi que nous sommes au lointain, sans idéal autre que celui d'un épicier qui se voudrait poète et non qu'il l'a été comme notre premier précurseur sur ces chemins inter frontaliers et sauvages.

Qui a fait une odyssée, qu'il la raconte !
Ô oui, qu'il ne se prive pas !

On y croira avec ferveur nous qui consumons notre jeunesse ailleurs et nos parents qui nous ont hypocritement laissé partir comme pour une campagne qui cache son nom seraient rassurés par des histoires.

Personne ne saura que vous avez inventé un invraisemblable. Nous, c'est certain, on ne détrompera personne.

Juré, nous serons votre jury d'honneur. À vous, raconteur de notre légende.